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Langage et Conscience

Il existe plusieurs stratagèmes de communication chez les espèces vivantes. Par exemple, certains serpents inoffensifs ont développé une coloration identique à celle de serpents venimeux, gagnants ainsi un respect immérité. Le poisson-lune, quant à lui, doit protéger son nid d’œufs des vagabonds qui réussissent parfois à se faire passer pour des femelles et ainsi réussir leur reproduction.

Si la tromperie est essentielle à la communication animale, un second principe doit exister, permettant de se tromper soi-même afin de faire passer dans l’inconscient certains faits et certaines motivations, afin de ne pas trahir la tromperie qu’on est en train de commettre.

pinochio

Pour l’homme, la qualité première de sa communication avec les autres est la conviction par laquelle il réussit à convier son message. Il est alors possible que la sélection naturelle aies développé dans notre conscience l’aptitude à croire à nos mensonges.

En fait, l’altruisme réciproque et hiérarchie sociale sont peut-être conjointement, et en grande partie, responsables de la malhonnêteté au sein de notre espèce. Les organismes dans une espèce hiérarchisée dotée d’un langage mettent en valeur leurs propres prouesses et minimisent celles des autres, et le tout avec conviction.

Dans les jeux de hasards, nous sommes enclins à attribuer nos pertes à la malchance et nos victoires à notre intelligence.

La sélection naturelle ne préfère ni l’honnêteté ni la malhonnêteté. Ce n’est pas son problème.[1]

Une expérience tout a fait surprenante sur les humains a réussi à démontré à quel point la conscience peut être oublieuse de sa vraie motivation et les efforts qu’elle peut fournir pour justifier les résultats de cette motivation. Cette expérience fut produite sur des individus ayant des complications avec l’épilepsie. Une séparation des deux hémisphères du cerveau permettait d’empêcher la récidive de crises. Ces personnes étaient donc des cobayes parfaits afin de faire des expériences qui impliquaient la conscience et le langage, ceux-ci se trouvant communément dans l’hémisphère gauche chez la plupart des gens.

cerveau

Une des expériences était de montrer rapidement le mot noix à l’œil gauche (hémisphère droit). Le sujet semblait ne jamais se rendre conscience de ce signal. En même temps, on plaçait la main gauche au dessus d’une boîte avec plein d’objets divers. Le sujet ramassait la noix, mais en était inconscient jusqu’à ce qu’on lui permette de voir ce qu’il était en train de faire.[2]

Dans une autre expérience, quand le sujet est amené à justifier sa conduite, l’hémisphère gauche du cerveau passe de l’ignorance avérée à la mauvaise foi inconsciente. Exemple : la commande marcher est envoyée à l’hémisphère droit du cerveau d’un individu, et celui-ci s’exécute. Quand on lui demande où il va, l’hémisphère gauche, qui n’est pas au courant de la véritable raison de l’action, va en trouver une autre : « je vais chercher à boire », dit l’homme convaincu.[3]

Le langage ne serait que « l’attaché de presse » des autres parties du cerveau; il justifie tout acte provoqué par ces parties du cerveau, persuadant le monde extérieur que l’acteur est un être raisonnable, rationnel et honnête.[4]

Il est possible que tout le domaine de la conscience soit lui-même, en grande partie, un pareil attaché de presse. La conscience trouve une grande variété d’innocents déguisements à la froide et égoïste logique des gènes.

Le cerveau est comme un bon avocat; on lui donne n’importe quels intérêts à défendre, et il se met en devoir de convaincre le monde de leur valeur morale et logique, sans s’occuper de savoir s’ils ont l’une ou l’autre. Comme un avocat, le cerveau humain veut la victoire, pas la vérité; et comme un avocat, il est souvent plus remarquable pour son adresse que pour sa vertu.

On pourrait même jusqu’à dire que non seulement le sentiment de contrôler consciemment notre conduite est une illusion, mais que c’est aussi une illusion intentionnelle, conçue par la sélection naturelle. Le libre arbitre serait essentiellement une adaptation.

Beaucoup de l’activité mentale d’un individu consiste vraisemblablement à imaginer une communication adressée à des auditoires, fictifs ou réels. Et cela peut avoir un effet considérable sur ce que l’individu se souvient et sur ce qu’il croit[5].

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Le langage a évolué en tant que moyen de manipuler l’autre à notre avantage. La connaissance, source du langage se trouve déformée en conséquence.

 


 

[1] Animal signals: information or manipulation? Behavioral Ecology

[2] Introduction to Psychology, p. 52 Ernest Hilgard et R.C et Rita Atkinson 1975

[3] On the evolution of Self-Knowledge and Self-Deception, p 109 Krebs, Denton, Higgins, 1988

[4] The mind’s sky p. 80, citation de Michael Gazzaniga, chercheur dans cette expérience

[5] The effect of an audience upon what is remembered, Claire Zimmerman et Raymond Bauer p.238-248 1956

 


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